Communiqué de presse du 28 mai 2019 : Selon un rapport de l’organisation de développement Pain pour le prochain, le groupe Socfin, basé au Luxembourg, et ses filiales suisses sont impliqués dans de graves violations des droits humains dans des plantations de caoutchouc au Libéria. Des ONG libériennes et les populations concernées ont déposé une plainte auprès de l’IFC, filiale de la Banque mondiale, qui a cofinancé l’une des plantations. Une action de protestation a eu lieu mardi devant le siège fribourgeois des succursales suisses de Socfin.
« Socfin, on t’observe » pouvait-on lire sur une banderole que les manifestantes et les manifestants ont déployée devant le bâtiment de la société de négoce de caoutchouc Sogescol à Fribourg mardi matin. En même temps, des ballons avec des yeux imprimés s’envolaient au-dessus du siège. Les organisations impliquées dans l’action – Pain pour le prochain, FIAN, Attac, Multiwatch et Solifonds – ont ainsi clairement indiqué qu’elles continueront à suivre de près les activités du groupe luxembourgeois de plantations de palmiers à huile et d’hévéas et de ses filiales suisses. Une action similaire a eu lieu lors de l’assemblée générale de Socfin à Luxembourg.
La veille, l’ONG libérienne Green Advocates avait déposé une plainte auprès de la Société Financière Internationale (IFC) au nom de 22 communautés villageoises. L’IFC est responsable, au sein de la Banque mondiale, du financement des entreprises privées. En 2008, elle avait accordé, un prêt de dix millions de dollars américains à la filiale libérienne de Socfin, la SRC, pour l’expansion de sa plantation d’hévéas. Green Advocates, une organisation partenaire de Pain pour le prochain, signale de graves violations des droits humains dans les environs de la plantation de la SRC et exige que l’IFC enquête sur ces allégations et veille à ce que les personnes lésées obtiennent réparation.
Violences et violations des droits fonciers
En février, Pain pour le prochain avait documenté, dans un rapport détaillé, ces violations des droits humains au Libéria. Lors de l’extension des monocultures d’hévéas, de nombreuses personnes ont perdu les terres agricoles dont elles dépendaient pour leur survie. En outre, des forêts sacrées et des cimetières ont été détruits et l’accès à l’eau s’est dégradé. De nombreuses personnes ont déclaré que leur eau avait été contaminée par des pesticides provenant des plantations. Et des femmes ont confié qu’elles étaient régulièrement exposées à des violences sexuelles par des sous-traitants et parfois par des agents de sécurité des plantations.
Pratiquement tout le caoutchouc importé du Libéria par Socfin est négocié et mis sur le marché mondial par l’intermédiaire de sa filiale Sogescol, basée à Fribourg. Sogescol exerce ainsi de facto un contrôle économique sur les deux plantations, mais n’a pas procédé à un audit de due diligence ni pris de mesures pour prévenir les violations des droits humains. Sogescol serait légalement obligée de le faire avec l’initiative pour des multinationales responsables, qui est actuellement en discussion au Parlement.
Plainte contre l’actionnaire de Socfin en France
Ailleurs, le groupe Socfin fait également l’objet de critiques. Lundi, une coalition de dix ONG internationales – dont Pain pour le prochain – dirigée par l’organisation Sherpa a intenté une action en justice contre le groupe français Bolloré, qui détient près de 40% des actions de Socfin. Cette action concerne la plainte déposée à l’OCDE dans une affaire d’accaparement de terres et d’autres violations graves des droits humains dans une plantation de palmiers à huile appartenant à Socapalm, une filiale de Socfin au Cameroun.
À la suite de la plainte adressée au point de contact français de l’OCDE, le groupe Bolloré avait accepté de mettre en œuvre un plan d’action convenu avec les communautés affectées en 2013. Mais ce plan n’a jamais été mis en œuvre par le groupe Bolloré. Avec cette plainte déposée devant un tribunal français, les ONG veulent maintenant forcer le groupe Bolloré à s’acquitter de ses obligations. Cette affaire montre également que les procédures non contraignantes, telles que les plaintes à l’OCDE, sont peu utiles s’il n’y a pas de bases légales pour exiger le respect des droits humains par les entreprises multinationales.
Face à l’impunité des multinationales,
Oui à l’initiative multinationales responsables !